Lunéville – Faïencerie depuis 1730

10/02/2020 Par C. Sébastien 0
Faïencerie de Lunéville
Faïencerie de Lunéville

Des manufactures de l’Est de la France, l’une des plus prestigieuse est indéniablement la faïencerie de Lunéville. Aujourd’hui fusionnée avec celle de Saint Clément, elle fut fondée en 1730. Il s’agit donc de la plus vieille manufacture de faïence de France toujours en activité !


Sommaire


La faïencerie de Lunéville, près de 3 siècles d’histoire

Au début du XVIIIème

Le fondateur de la manufacture de faïence de Lunéville, Jacques Chambrette, était le fils d’un maître faïencier de Dijon. Lunéville le voit s’installer, en 1722, en tant que marchand de faïence. Son talent l’amène à devenir en 1723, fournisseur de la Cour.

En 1730, Jacques Chambrette ouvre sa première faïencerie dans cette même ville. Grâce à sa position, il obtient l’année suivante des lettres patentes, édits lui offrant divers privilèges. Grâce au Duc François III, il peut alors s’approvisionner en matières première ou bon lui semble. De plus, Elisabeth-Charlotte d’Orléans l’exempt d’impôts et de charges.

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En s’associant avec Daix, Jacques Chambrette reprend la Verrerie de Portieux en 1739. Daix en était jusqu’alors locataire à bail.

La mise au point de la Terre de Pipe et de la Terre de Lorrain, en 1748, permette la réalisation de faïence fine et blanche. Les pièces réalisées gagnent en délicatesse. Les détails y abondent désormais. Le raffinement des faïences ainsi produites charme non seulement Voltaire ou Émilie de Châtelet, mais surtout le Roi Stanislas Leszczynski. C’est ainsi que Jacques Chambrette obtient ses dernières lettres patentes et, la distinction de Manufacture royale !


Seconde moitié du XVIIIeme siècle

Son développement s’en voyant accéléré, la manufacture de faïence de Lunéville conquiert les marchés Allemand, Polonais et Italien. L’export croît, le nombre d’ouvrier y travaillant avec. Plus de 200 ouvriers sont recensés dans cette faïencerie en 1753.

Jacques Chambrette meurt en l’an de de Grâce 1751. Son fils, Gabriel Chambrette, et son gendre, Charles Loyal, reprennent, entre autres manufactures, la faïencerie de Lunéville. Néanmoins, leur alliance ne dure guère. Les deux comparses se séparent et Gabrielle Chambrette conserve seul la faïencerie de Lunéville.

Décor réverbère ayant fait le succès de la faïencerie de Lunéville dès le début du XVIIIème siècle
Le décor Réverbère était déjà, au milieux du XVIIIème siècle, la gamme emblématique de la faïencerie de Lunéville.

Face au coût écrasant des taxes d’exportation vers la France, la manufacture de faïence de Lunéville se retrouve financièrement en difficulté. Le nombre de ses employés diminue jusqu’à une petite vingtaine. C’est alors que Sébastien Keller la rachète en 1786.


Du XIXème à nos jours

Ce rachat est salvateur. Grâce aux moulins “à plâtre” de la Vezouze rachetés par cet investisseur l’année suivante, la manufacture bénéficie de nouveau de matières premières. Les progrès techniques continuent bien après la mort de S. Keller en 1829.

En effet, en 1853, la manufacture s’équipe de nouveau fours à charbon, bien plus efficaces que les anciens fours à bois. Dans un même temps, la méthode de décoration par transfert se popularise. En 1869, les premières machines à vapeur sont installées. La production est industrialisée dans les années 1870, lors de l’occupation Allemande. Il faudra attendre 1887 pour que la faïencerie de Lunéville bénéficie de l’électricité.

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De 1870 à 1871, un conflit éclate entre la France et une fédération d’États Allemands : la guerre de Prusse. Il s’agit d’une revanche pour la bataille de Iéna et les hostilité s’achève par la victoire Allemande. Cette issue amènera à la création d’un Empire Allemand.

Edouard Fénal rachète en 1922 les manufactures de Lunéville et de Saint-Clément réunifiées en 1892. 36 plus tard, au cours d’une OPA, il fait main basse sur la faïencerie de Sarreguemines. Toutefois, chaque manufacture garde son style artistique.


La faïencerie Lunéville : un style atypique et remarquable

La création de collections intemporelles

Durant les premières décennies de la faïencerie de Lunéville, les formes des faïences sont proches de celles de l’orfèvrerie : sculptées et travaillées. Il faudra attendra la moitié du XVIIIème siècle pour que la direction artistiques de Lunéville change.

Les nouvelles découvertes en chimie minérale permettent en effet le développement de nouvelles techniques de décoration, notamment grâce au procédé petit feu. Les fours à réverbération indispensables à cette technique de cuisson donne à une gamme le nom de Réverbère. Réputée pour ses couleurs tendres, révolution dans la faïence du XVIIIème, ainsi que ses tulipes et ses roses emblématiques, Réverbère devient le produit phare de la manufacture. Cette collection est l’une des seules à avoir traversé les siècles et être encore produite et commercialisée de nos jours.

Un autre décor emblématique de la manufacture naît en 1765 et traverse ensuite les âges : Le Chinois. Connu entre autre pour ses papillons caractéristiques, elle tire son succès des travaux de Jean Pillement dont elle s’inspire largement. Dans un même temps se développe la rocaille, un style d’inspiration germanique. Enfin, de nombreuses statuettes en terre de Lorraine font leur apparition, dont celles de Paul-Louis Cyfflé.

L’exposition de l’industrie de 1806 accorde à Keller une mention honorable bien méritée. S’en suit une médaille d’Or, 17ans plus tard, à l’exposition de Paris. Les années d’expérience et d’expérimentation de la faïencerie de Lunéville jouent en sa faveur.


Les courants majeurs de la faïencerie de Lunéville : Art Déco et Nouveau

C’est à la fin du XIXème siècle, sous la tutelle du baron Maurice de Ravinel, qu’un atelier d’Art voit le jour à la manufacture. Les émaux à effets sont alors le centre d’attention. Ces derniers amènent progressivement l’Art Déco, ainsi que de nombreux modèles d’inspiration végétale. Néanmoins, le manque de rentabilité d’un tel atelier aboutit à sa fermeture une décennie plus tard.

A l’issue de la première guerre mondiale, la manufacture de Lunéville entre dans sa période Art Nouveau. Les frères Mougin n’y sont pas étrangers, ayant relancé l’atelier d’art de Ravinel. De nombreux décorateurs et sculpteurs les accompagneront alors. Géo Condé, Emile Bachelet, Thomas Cartier, autant de grands noms se sont succédés au service de la manufacture.

C’est ainsi que les faïenceries de l’Est assiéront leur renommée.

Logo de la manufacture de faïence de Lunéville